10/04/2016 PATCHWORK à la BASHUNG

1/ Façon Bashung

Pour écrire une chanson, Bashung avait l'habitude d'en écrire trois et de les mélanger !

A partir d'une chanson de Bashung, de G.Roussel et de Clarika (que nous vous laissons deviner) voilà, nos textes :


MISTRALINE :

J’ai oublié les joies, désossé les liens
Qui nous rongeaient les os, à bord de ce train-train
Où rien ne me retient

Vénus sait lire sur les lèvres
Comme une simple passagère
En haut du grand trapèze
Elle vient éclairer ma nuit

J’ai balayé les traces, désossé la peine
Qui nous rongeait les os, à bord de ce train-train
Où rien ne me retient

Guidée par une étoile, une ombre si légère
Enchaînée à mes pas, à fuir les profondeurs
Enchainée à mon sort et ce socle trompeur
J’ai traqué ton amour sur des accords de braises

J’ai traqué les délices, désossé le destin
Qui nous rongeait les os, à bord de ce train-train
Où rien ne me retient

Déesse des caprices que rien n’attache
J’ai éclairé ma nuit de délices divers
Goûté aux alentours la tasse du réel
Et les fruits à portée de main

J’ai assiégé le ciel, désossé les attaches
Qui nous rongeait les os, à bord de ce train-train
Où rien ne me retient



2/ Sept mots pour construire un conte

Madeleine - Tomate - Parler - Cheval - Papillon - Arbre - Coffre


MISTRALINE :

Autrefois, il y a bien longtemps, il existait une contrée où le temps était toujours radieux ; il n’y avait jamais de pluie diluvienne, jamais de tempête, jamais de canicule et jamais de grêle, non plus. Le ciel était pur comme une larme de fée, la nature était généreuse et la vie courrait dans les grasses prairies inondées de fleurs sauvages.
Le roi de ce pays était un homme-cheval. Ses cheveux étaient dorés comme le soleil, ses pattes arrières étaient solides, ses pattes avants étaient agiles, ses bras étaient forts et sa tête bien faite. Il régnait sur un royaume où les sujets étaient tous des êtres d’exception. Les humains tels que vous et moi, ignoraient tout de ce pays, et s’il arrivait que le hasard en guide un jusqu’au royaume du roi cheval, il était aussitôt reconduit en territoire humain.
Chaque année, pour fêter l’arrivée de l’été, le roi cheval prenait plaisir à convier tous ses sujets afin de les réunir autour d’un fabuleux festin ; du plus simple au plus fortuné, du plus brave au plus effronté, tous étaient ce jour-là, conviés à la table du roi. Même la reine des arbres, qui lui cherchait querelle depuis la nuit des temps, était la bienvenue. Personne n’ignorait qu’elle se ferait un devoir de refuser l’invitation !
Cependant, lors de l’année de la Grande Marche, les habitants de cette contrée étrange, eurent la surprise de voir la mystérieuse reine des arbres se présenter au palais du roi cheval pour assister aux réjouissances du solstice d’été.
Vêtue de lierre rouge et de lichen laiteux, coiffée de ronces et de sureau, elle s’avança vers le roi entourée de sa garde de chênes sombres. Le roi la salua et accepta le présent qu’elle lui tendait ; un paquet emballé dans une nappe de brume mauve. Celle-ci s’estompa lentement et chacun découvrit, émerveillé, un papillon de nacre posé dans un écrin de mousse. Le papillon vivait. Les convives pouvaient le voir frémir. Mais il remuait si faiblement ses ailes que le roi souffla vers lui quelques bouffées d’air chaud pour le revigorer. Alors la nacre se fit plus brillante et les ailes devenues vives, libérèrent un éclat magnifique. Soudain le papillon s’envola comme une fleur au vent, il monta vers le ciel, haut, très haut, jusqu’à disparaître dans l’immensité azuréenne.
La reine des arbres rassura le roi : le papillon de nacre reviendrait bientôt, nourri des rayons du soleil. Ainsi, il illuminerait la nuit quand la lune est noire.
Le roi connaissait bien cette reine mi-femme, mi-forêt, son odeur de miel et de résine, ses cheveux pleins des reflets du bois, ses doigts qui s’agrippaient comme des racines et même sa voix qui grondait comme le torrent. Et rien ne pouvait le rendre plus heureux que d’effacer de vieilles rancœurs. Il soupira d’aise et mangea une belle laitue sucrée et de grosses  pommes juteuses. Un peu plus tard, tandis qu’on venait de servir les desserts, d’un seul coup d’un seul, on vit le ciel se charger de gros nuages menaçants et l’air devenir lourd et collant comme de la mélasse. C’était si inhabituel que chacun crût d’abord à une farce du Cerf-druide. Interrogé, il avoua qu’il n’y était pour rien.
Le ciel si clément d’ordinaire couvait une colère noire. Des éclairs de chaleur surgissaient çà et là, des bourrasques de vent brûlant assaillaient les convives en pleine digestion.
Au milieu de cette torpeur, le papillon de nacre reparu soudain, il semblait traverser les nuages rageurs poussé par une folle allégresse. Ses ailes lumineuses contrastaient dans la noirceur du ciel et son vol était une danse aussi légère que la chute d’un flocon. Au terme de sa gracieuse envolée, il se posa élégamment sur le roi, qui en eut le souffle coupé. Ce dernier se mit bientôt à gonfler, à gonfler, à rougir, à rougir jusqu’à ce que tout son corps se déforme et se métamorphose en une immense tomate, charnue et écarlate.
Tous ses sujets restèrent d’abord bouches-bée, médusés, avant de s’inquiéter du sort de leur bon roi. Un murmure craintif fini par s’élever de la foule qui avait cessé de festoyer, de rire et de chanter. Soudain un rire sinistre s’éleva parmi les convives, un rire amer mais triomphal ; la reine des arbres s’était levée, ses yeux de rivière sombre jaugèrent le roi-tomate un bref instant, puis elle s’adressa à la foule, muette, inquiète, abasourdie.

-         Le sortilège du papillon de nacre est éphémère, l’âme sera butinée durant trois petits  jours… avant que ne se meurent… le papillon et sa proie… mais il n’est pas impossible qu’il soit attiré ailleurs… un papillon c’est si volage…

Sans en dire davantage, la reine des arbres quitta la fête qui n’en était plus une. Elle s’en retourna dans les profondeurs boisées qui abritait ses rancœurs.
Le savant hibou qui conseillait le roi depuis toujours fut le premier à parler. Il allait feuilleter tous les grimoires du royaume et il trouverait bientôt la façon d’annuler le sortilège du papillon de nacre. Il se donna tant de peine à lire et à lire encore, qu’on raconte qu’il en perdit la vue. Il fallait se rendre à l’évidence, rien ne ramènerait le roi-cheval. Le Cerf-druide avait essayé, durant trois jours, de redonner sa forme au roi, tous ses élixirs et tout son savoir s’étaient heurtés à une grosse tomate.
On hissa les étendards des ténèbres et la contrée étrange se prépara à faire le deuil de son roi.
Un jeune enfant, tout grassouillet et beau comme un poupon, avait franchi en ce troisième jour funeste, la porte du palais en gazouillant des mots qui sentaient bon le beurre. En temps normal, il aurait créé un attroupement peut-être même une émeute ! Bien entendu, en ce jour de deuil, personne n’y avait prêté attention. A l’abri des regards, l’enfant d’homme avait tranquillement exploré le dessous de la longue table du roi, à quatre pattes, sans que personne ne remarque sa présence. Il avait suivi son petit bonhomme de chemin jusqu’à tomber nez à nez avec une grosse tomate. L’enfant avait éclaté de rire comme seul les tous petits savent le faire, de ce rire si spontané qu’il en devient contagieux. Il n’en revenait pas de voir cette grosse tomate lui faire face, lui tenir tête et lui barrer le passage. Riant aux éclats, il se pencha en arrière exagérément et aperçut tout en haut, le papillon de nacre cramponné à la grosse tomate.
Sa bouche s’arrondi, ses yeux s’écarquillèrent, tout son visage s’extasia devant la splendeur du papillon de nacre. Il tendit la main vers lui, il aurait tant voulu le tenir dans ses petites mains dodues pour l’avoir tout contre lui et le regarder de près… il aurait tant aimé l’avoir… Mais le papillon était bien trop haut pour qu’il puisse l’atteindre ; dépité, il chercha ailleurs un peu de réconfort, il fouilla dans sa poche et en tira délicatement sa dernière madeleine au beurre. Il la regarda avec envie, tout le faisait saliver : son moelleux et son goût savoureux, son parfum de tendresse et comment c’était bon de la laisser fondre dans la bouche en la mâchant à peine pour ne pas la broyer. Sans plus attendre, l’enfant porta la madeleine à sa bouche. Il salivait trop pour résister à l’appel de la gourmandise. Soudain le papillon frémit et s’envola. Le soleil réapparu plus éclatant que jamais. Le ciel se dégagea sans tarder et l’air s’allégea enfin. L’enfant avait commencé à manger, il avait fermé les yeux de contentement. Ses jolies lèvres parsemées de miettes dorées exprimaient tout son bonheur papillaire. Alors qu’il était prêt pour une seconde bouchée, il découvrit le papillon agrippé à sa madeleine. L’enfant, hébété, n’osa plus bouger. Comme il était beau avec ses éclats irisés bleue, rose, violet ; l’enfant dévorait des yeux ce petit animal qu’il tenait sur un bout de madeleine au beurre.
La grosse tomate se mit à tousser tout d’un coup. Deux bras lui poussaient, et une tête, et un corps de cheval à la robe dorée. Le roi reprenait sa forme originelle, non sans mal. Il toussait beaucoup, et crachait des pépins de tomate à chaque quinte. Toute la grande salle du palais fut ensemencée !
Lorsqu’il eut retrouvé ses esprits, avant même de réaliser qu’il avait échappé au pire, il se laissa happer par une odeur étrange, d’instinct il en chercha la provenance et son odorat le guida sous la table. Il souleva la nappe et tomba nez à nez avec l’enfant, la madeleine et le papillon. Le tableau aurait été charmant si le papillon ne renfermait pas un sortilège fatal. L’enfant était resté sagement assis, le bras posé sur ses genoux, la madeleine au bout des doigts.
Le roi n’en croyait pas ses yeux ! Enfin, il remarqua que le papillon ne bougeait plus, il avait perdu tout son éclat. L’enfant qui voyait le roi observer son papillon avec envie, le lui tendit spontanément avec un grand sourire complice. Le roi cheval qui n’osait plus toucher le cadeau de la reine des arbres, imita l’enfant, et ne prit entre ses doigts que la madeleine.

Le papillon avait changé d’aspect. Heureusement l’odeur du sucre l’avait détourné du roi. Et ce sucre dont il s’était nourri l’avait cristallisé. Le roi soulagé, admira le papillon devenue statue de sucre  inoffensive; l'arme de la reine des arbres était devenu un magnifique objet qui serait rangé dans le coffre aux trésors. Quant à l’enfant d’homme, il gazouillait au roi des paroles insouciantes tandis que ce dernier le hissait sur ses épaules pour le ramener vers les siens.



3/ Ecrire en Jingulu



Cette langue australienne ne possède que trois verbes : Venir – Aller – Faire
Une bonne contrainte pour mettre un pied en poésie en créant du visuel !

MISTRALINE :
Courir : venir comme le vent
Pleurer : faire aller le chagrin
Mourir : aller vers les étoiles
Chanter : faire comme l’oiseau
Danser : aller en rythme
Rencontrer quelqu’un : venir vers l’inconnu

Rire : faire sourire le ventre

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