14/04/2015 Le portrait maternel

(…) il y aurait juste sa mère comme croûte terrestre, sa mère en blouse bleue taillant les buissons, ses mains avançant entre les feuilles un sécateur beaucoup trop lourd pour elle, sa mère bossue parmi les massifs parmes, bleu ciel, roses, sa mère toute petite, toute sèche hormis les joues très rouges et cirées comme des pommes, toute friable, ostéoporose et trous de mémoire (…)

naissance d’un pont, maylis de kerangal, p150


Ici pas de contemplation, pas de ratiocination ; juste mettre la mère en situation, la voir, la revoir, la donner à voir.


Texte de FRANCINE :


… il y aurait juste sa mère assise au bout du verger, sa mère enrubannée de plastique maniant les pinceaux, ses mains jetant sur la toile des touches de bleu, de vert et de doré, sa mère transportée par la poésie du paysage encoloré, absorbée par la lumière, irradiée et fascinée par le décor changeant au gré de ses gestes, minutieuse et précautionneuse, appliquée comme absente du monde, heureuse et lointaine…


Il y aurait juste sa mère, au teint frais de jeune fille. La taille ajustée, la poitrine haute et la jupe virevoltante au rythme des claquettes. Sa mère qui danse, sa mère qui sourit. La musique entrainante invite les amateurs. Les doigts claquent. La tête branle. Les rires fusent. La jeunesse s’amuse et oublie la torpeur.
Il y aurait juste sa mère et son monde artificiel. Les yeux brillants, la lèvre humide, les joues rebondies et chaudes, légèrement rougies sous la poudre qui illumine son visage.  Le corps se trémousse et se noie jusqu’à l’épuisement. Sa mère, jeune fille éphémère et éternel roseau, fluctuant au gré des notes et des blues nostalgiques. Les pieds battent la cadence. Le rythme effréné déhanche. Sa mère est clarinette, vibrato ou violon, c’est selon.




Texte de MISTRALINE :


il y aurait juste sa mère, phare éphémère, sa mère en bustier noir J.P Gaultier dansant dans les miroirs, ses mains lestes glissant sur ses hanches un jean qui l’épouse depuis quinze ans, sa mère gracieuse, en résilles noires, en satin gris, en dentelles saumon, sa mère si petite, toujours hissée sur les talons de la démesure, les joues ravalées par le fard et les lèvres remplies de tons sanglants, toute seule sa mère, en camisole dans ses névroses

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