22/02/2015 Auscultation Littéraire

I/ L'auscultation littéraire :

·         Erri de Luca est né à Naples en 1950, rien ne le prédestinait à écrire, il était ouvrier !
« Il y a plus d’un mois que je ne mange pas chaud, mon intestin gargouille une rengaine comme le feuillage d’un arbre au réveil des nids. »
« … je sens des abeilles dans mon sang, un ours dans mon cœur, chaque battement est une patte qui démolit la ruche.» Extrait de TROIS CHEVAUX d’Erri De Luca


JOËLLE : 

La machine s'essouffle et crachote une série de petites quintes, les palpitations jettent le sang affolé dans des vaisseaux spasmés, les mâchoires se crispent et la douleur incontrôlable me terrasse.

La veine rouge de la lave s'écoule lentement vers le sol et bloque douloureusement le membre le laissant pantelant tel un bois tordu et mort, pétrifié et inutile.

Le feu se cogne aux parois lisses de mon crâne, une montée tumultueuse de lave est régurgitée par la grotte béante et dentelée de ma bouche qui crache pierres et serpents.

Ca virevolte, ça chante, ça se dilate comme un vin nouveau qui pétille sur la langue et me baigne de langueur et de béatitude. Le monde n'en paraît que plus beau.

La douceur d'un soleil printanier au gré d'une brise bienfaisante joue avec ma peau de ses milliers de picotements d'abeilles joyeuses.

Petit, menu, discret, puis deux et trois et dix et cent, les petits vers de la jalousie grignotent mon bon sens jusqu'à ne laisser derrière eux qu'un territoire ravagé.


II/ Des mots sans queue ni tête :



JOËLLE : 

Confortablement installée sur un banc, face à l'étang, je regarde les canards batifoler et laisse mon imagination divaguer.
- " Beau ciel aujourd'hui, bien accordéon...
-  Pardon?
- Je me mets un peu sur votre cheval pour me respirer, mais je ne voudrais pas vous emberlificoter...
- Excusez moi, je n'ai pas bien compris
- Oh! pas grave, la saison est verte et les chatons sont de beaux baigneurs. Chez moi, je n'ai que des ours sur la table et le temps passe en roulant, c'est assez venteux tout ce bazar.
- Vous m'en voyez désolée.
- Ne soyez pas, ne soyez pas. Hier j'ai voulu me brosser les fauteuils et je me suis faite saignée, alors je vais aller à l'épicerie.
- Vous avez bien raison.
- Raison ou banane, ça je m'en fiche, l'important c'est l'ordonnance, vous comprenez?
- Oui! oui! bien sur.
- Et vous, vous venez souvent vous assoir sur ces arbustes pour regarder nager les roseaux? C'est un bel enjoliveur, et moi aussi je préfère ce plafond. Allez, je m'en vais, je reviendrai avec mes mains.
- Au revoir, ravie de vous avoir connue.


III/ L'art de la substitution :


JOËLLE : 

Muet comme une harpe,
Le chanteur dans son habit blanc
Crache des hallebardes
En vaillant combattant.
Le chanteur n'a plus vingt ans.

Le regard fixé sur l'horizon,
Gai comme une prison,
Fait pleurer à gorges déployées
Un public mal intentionné.
Le chanteur est bien moins grand.

Il souffle comme une loque
Passé au laminoir, debout sur la scène
Face au public obscène,
Il veut mourir à perdre haleine.
Le chanteur n'est plus un géant.



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