07/01/2013 La Belle Epoque et ses muses

Nous oublions souvent que début 1900 certaines femmes menaient Paris par le bout du nez. Ces muses excentriques s'appelaient Blanche d'Antigny, Valtesse de la Bigne, Cléo de Mérode, La Belle Otero, Émilienne d'Alençon, Diane de Pougy et quelques autres comme la Goulue ou Mata Hari.


Proposition : Créer de toute pièce un personnage de cocotte. Une femme vénale, drôle, intelligente et fascinante. Inventez-lui un nom pompeux et élégant. Trouvez son allégorie et replongez-nous dans la belle époque sous la forme d’une chronique mondaine qui relaterait l’une de ses apparitions sur scène.


TEXTE DE JOELLE


Je connais le pouvoir des mots.
Ces mots qui tels des flèches se fixent dans nos cœur,
Ces mots qui tels des traits rayent nos mémoires,
Empreintes ineffaçables.
Il suffit d'un ressac et tout vous revient,
Cuisant comme plaie dans le sel.
Certains tout en douceur sont caresse pour l'âme,
Je connais le poids des mots.
Avec ces mots une vie se bâtit,
De ces mots se forge un caractère.
Une brise qui passe, un éclair dans le ciel,
Pantelant ils vous laissent, ou vous mènent à la gloire.


TEXTE DE MARIE-HÉLÈNE

APHRODITE DE LA CLAIRIERE OU LA PREMIERE SCENE  07 Janvier 2013

(Rédacteur Eugène Dupied, journaliste à la Gazette Joyeuse le 09 Septembre 1907)

Ce soir et pour la première fois, Aphrodite de la Clairière se produit sur la scène de La Truie qui File, Rue Champollion.
Bien avant le lever du rideau, la salle enfumée bruisse des dernières rumeurs. Le Baron de Gambetta guette d’un œil énamouré l’apparition de La Panthère Replète. Grivois, le Comte de la Morandière caresse les lourdes tentures de velours pourpre, sous les regards courroucés de sa bien-aimée, indignée des gémissements de ce jeune pourceau ronronnant.
Enfin, dans un feulement lascif, le rideau s’ouvre sur celle qui attise toutes les convoitises. Sous sa longue robe de mousseline argentée, ses jambes frémissantes s’ouvrent avec impatience. La fine étoffe caresse une émeraude lovée au creux de  son petit ventre bedonnant. De sa taille suave, coule une rivière précieuse qui  ondule au rythme des premières notes.  Ses seins lourds et nacrés, à peine voilés, scintillent sous l’or de perles fines. Ses lèvres juteuses, entrouvertes dans un sourire carnassier, dévorent les salves de hourras du public extasié. Ses fesses rebondies s’offrent aux regards concupiscents des mâles de l’assemblée, nénuphars alanguis sur les remous d’un lac de désir. Sous  ses paupières charbonneuses, les lumières de la scène font miroiter les prunelles de jade gourmandes de cette Panthère Replète. Ses longs cheveux bouclés, noir de jais, emplumés d’une tiare multicolore étincellent des mille flammes de la tentation provoquée. Ses bras ouverts, parés de rubis et de saphirs envoient de longs baisers à l’assistance médusée.   Elle ondoie à petit pas  voluptueux, féline, souple, impudique sur les planches libertines. Et sa voix grave, chaude, légèrement éraillée, s’envole au firmament du poulailler subjugué de tant de mépris pour les règles du solfège. Elle louvoie entre les notes, frôle les bémols, effleure la clé de sol.
Mais les hommes n’entendent que le chant de son corps savoureux et geignent d’un plaisir inassouvi, petits lionceaux affamés des mamelles maternelles. Et à la fin du spectacle, cette plantureuse jeunesse s’enroule dans les plis de velours alors que les applaudissements tonnent dans le théâtre surchauffé.
L’obscurité engloutit les feux  de la rampe. Cette première aura été un succès. Gageons que notre Aphrodite illuminera encore les salons, diadème éternel scintillant à l’orée de sa clairière.



TEXTE DE SUZANNE

CAT  D’ERMENONVILLE

 Hier soir, la salle du Palais Royal était comble. Au parterre habituel des amateurs de cabaret, commerçants ou notables, se mêlaient discrètement quelques aristocrates, comme le Duc et la Duchesse de Villetaneuse, le Marquis de Vallabrix et même le Prince d’Orange. 

Tous, attendaient fébrilement la prochaine entrée en scène de la toute nouvelle  meneuse de revue, la talentueuse, la Divine, « Catherine d’Ermenonville », dite « Cat d’Ermenonville ». Sa réputation sulfureuse l’ayant précédée, hommes et femmes frémissaient bien avant son apparition.

Ces dames vêtues de leurs plus beaux atours, rivalisaient d’élégance. Leur taille de guêpe prise dans un corset serré, accentuait leur gorge pigeonnante, attisant il faut bien le dire, quelques regards concupiscents de ces messieurs. Etoffes soyeuses du Prince, parures scintillantes, riches montres à gousset reliées à de solides chaines d’or, tout cela témoignait de l’opulence de l’assistance.

Ces dames jalousaient par avance l’artiste. Elles espéraient trouver le défaut de cette rivale inconnue, leur permettant de conserver leur avantage auprès de leurs époux, qui de leur côté n’attendaient qu’une chose, contempler la féminité dans toute sa splendeur. La tension était palpable dans l’assistance.

Les lourdes tentures grenat se sont enfin ouvertes, laissant apparaître la Sublime « Cat d’Ermenonville », seulement vêtue de très rares plumes habilement placées, d’une longue queue noire, faisant pendant à ses interminables jambes fuselées. Ses yeux en amande frangés de longs cils noirs recourbés abritaient un regard farouche, mystérieux. Un large collier de diamants enserrant son cou gracile et de fines moustaches en guise de vibrisses, surmontant une bouche gourmande complétaient sa tenue.

Son corps quasi dénudé, aux rondeurs callipyges attirant les caresses, libre de tout mouvement, se mouvait avec la souplesse d’un félin, au rythme d’une musique tour à tour lente ou endiablée. Sa plastique parfaite, aux seins fièrement dressés, au corps ondulant, à la fois câline et capable aussitôt après, de donner un coup de ses griffes acérées, s’apparentait parfaitement à son personnage de chatte frivole et indépendante.

Le public envoûté, fasciné, regardait bouche bée, évoluer la danseuse. Tous étaient sous le charme de la jeune femme. Un tonnerre d’applaudissements et de hourras a salué la fin de la prestation de « Cat d’Ermenonville », La  Chatte Mystérieuse.

Pour ma part, je retiendrai de cette soirée exceptionnelle, une artiste libre, au corps de rêve, aguicheur, offert à notre désir, abritant une âme mystérieuse. Je suis persuadé que « Cat, la Chatte Mystérieuse » restera dans nos mémoires et éblouira par sa beauté et son talent, les scènes du monde entier.


TEXTE DE FRANCINE



Pour clore le réveillon de cette Saint Sylvestre, nous accueillons au lever de rideau pour descendre les marches du grand escalier et rejoindre le plateau de cette salle parisienne si renommée et que l’on ne présente plus, la belle, la radieuse, l’éblouissante Olympe de Mezencour, reine incontestée de cette soirée.

Très légèrement vêtue d’un pagne en lamé d’or, la taille finement soulignée par une chaînette de perles rose nacrées, le buste étroitement moulé dans un corset de diamants, son corps de liane souple est généreusement mis en valeur par la poudre satinée qui recouvre sa peau laiteuse.
Les cheveux de jais étalés sur les épaules nues en un décoiffé savamment ordonné, son port de tête royal est encore renforcé par un diadème de brillants orné d’une émeraude à l’eau si claire qui se reflète dans les yeux de lac immense de la belle Olympe.
Tel un divin félin en liberté, la reine fait son entrée sur scène au pas chaloupé de ses jambes galbées de soie fine.
Tous les hommes ici présents ont le cœur en émoi et le regard fixé sur l’apparition majestueuse qui tel un ange de beauté condescend à se poser parmi nous.

Le chef d’orchestre s’avance et tend le bras. Il a le privilège immense de recevoir la main gantée, ornée d’un magnifique rubis au bracelet Cartier assorti, et de guider la déesse face à son public debout, qui lui offre une longue ovation.
Sa beauté n’a d’égal que son talent, ne boudons pas notre plaisir, et écoutons avec recueillement la voix cristalline d’Olympe qui va nous ensorceler encore une fois.

C’est très respectueusement que je me permettrai dans quelques instants de baiser les doigts de cette fée, et de lui souhaiter en votre nom, et au mien, mes vœux pour la nouvelle année et la féliciter de la lumineuse radiance de sa beauté.



TEXTE D'ISABELLE


La gazelle de diamant

C’est aux folies bergère que le prestige et le talent allaient vagabonder les dimanches de frimas. La gazelle de diamant, la magnifique et indomptable Sirielle de l’Estella était entourée de tous les matous ronronnant. Cette manipulatrice machiavélique,  angélique beauté s’épanouissait dans l’ocre rouge damassée de tendresse achetée. Elle étincelait d’or et de splendeur. La gorge soyeuse s’agitait sous sa parure de brillance, ses jambes éternelles enlaçaient les yeux brillants des bedonnants amoureux.
Elle était parée de ruisseaux de lumière et les mâles étriqués fantasmaient le soleil, la chaleur, l’extase.
La traitresse fugueuse se prélassait, minaudait, se cambrait, froufroutait, susurrait de l’ivresse, du mystère à l’oreille alanguie de ses fidèles hypnotisés. Sa peau de miel, ses yeux de feu, sa chevelure étoilée, sa bouche scintillante, ses épaules comme des dunes précisaient un mets succulent. Les maitres du monde s’imaginaient esclaves languissant.    Les lions se trainaient aux pieds de cette audacieuse fragile. Elle était la diva couronnée et savourait outrageusement son avantage au nez des officielles abandonnées. Les chasseurs n’étaient pas à cours de manières et de largesse pour ce gibier redoutable. Nulle jalouse méprisante ne serait venue s’immiscer dans cette jungle perverse.
La belle, sous ses allures de biche était cruelle.
Chacune de ses apparitions était fatale.


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