22/10/2012 ça m'agace !!



Jean-Louis Fournier, écrivain, humoriste et réalisateur pour la télévision a obtenu le prix Femina 2008 avec son roman « Où on va, papa ? ».

Il revient avec son livre « Ça m'agace ! », qui sort aux éditions Anne Carrière ce mois-ci : « (…) je suis un type qui est toujours agacé ; je n'ai aucune patience. Je suis un emmerdeur, comme on dit ; je suis toujours à vif, énervé par les choses de la société moderne. Tout cela je l'ai écrit, et puis ça m'agace ! »

Texte de Joelle

Ca m’agace, oui ça m’agace tous ces petits bruits de la vie. Le clic clac d’un stylo nerveux, le toc toc rythmé du couteau  retombant sur la table, le grincement de la fourchette dans l’assiette, les bruits de succion, de mastication et le bourdonnement de cette guêpe qui danse  autour de ma chaise.
S’il n’y avait que ça ! Mais non, il y a l’allumette au coin de la bouche, les vestes qui s’entassent sur les dossiers de chaise, les chaussures qui ne retrouvent jamais le chemin du placard, le linge sale qui ignore où se trouve la corbeille…
-          C’est tout ?
-          Mais non ce n’est pas tout !
Tu le vois ce tube de dentifrice qui court après son bouchon en laissant des traces sur le lavabo, telle une limace ? Ces poils qui jouent aux quatre coins dans le siphon ?  Le bol sale qui reste sur l’évier à attendre on ne sait quoi ? La table qui appelle désespérément un chiffon sourd d’oreille ?
Eh oui, toutes ces choses qui m’ont value le doux surnom de « Roumègue ».
Et encore,  comment ne pas se sentir agacée par ces gens qui se faufilent pour prendre ta place, ces voitures qui occupent deux emplacements pendant que toi tu fais le manège en cherchant où te poser. Difficile de ne pas parler du caddy qui fait l’âne et refuse d’avancer, du rouleau de papier qui se termine juste à ton tour et ça vaut pour tous les rouleaux !
-          Eh oui, ça m’agace, ça m’irrite, peut être même que certains jours ça m’énerve !
Alors arrivent les biens pensants, ceux qui restent positifs quoi qu’il arrive, surtout aux autres :
« Tu devrais prendre du recul, ce n’est pas si grave… »
« Vois les choses positivement, tu verras ça change la qualité de vie… »
Mais ça aussi ça m’agace, ces refrains quantité de fois entendus, ces conseils à répétition, oui, tout ça m’agace.
Par contre ce qui ne m’agace jamais, c’est le vent qui joue dans mes cheveux, le soleil qui chauffe mon corps, le chant des cigales, les longues marches sur la plage ou en forêt avec des amis, les repas entre copains, la vie quoi !
Alors tant pis pour ces agacements, ce ne sont après tout que des parasites.
Des parasites, des écornifles enquiquinants mais peut être nécessaires pour apprécier le reste.
Enfin peut être…. Mais ça m’agace !

Texte d' IR

Certains jours, ça m’agace, ça me met le cent mille volts.

Le quotidien taquine. Les petits riens chatouillent, viennent troubler le calme, bousculer le caractère passionné.
Ce n’est pas grand-chose si c’est à petites doses… mais de façon répétée, impossible de résister à l’explosion tardive d’un contenant trop plein, prêt à déborder.

ça commence au lever; visage enfariné, pensées emmêlées, le café à côté, le sucre renversé, l’enfant se met à rêvasser, le bus est passé ! Les clés introuvables, le téléphone n’arrête pas de sonner!
Le retard n’est pas grave s’il est maitrisé -
On respire - ça va passer

Calme sur la ville ? Non ! Ça va s’accélérer !

La voiture de gauche qui veut fricoter- la voiture de droite qui arrive dans le rond-point avec autorité.
Aujourd’hui ils ont décidé de me faire muter.
Mes sens aiguisés vont tout remarquer.
Impossible de se dégager de cet envers programmé.

L’enfant s’en va sans même se retourner,
Place introuvable, que des billets, pas de monnaie, le gendarme marque son autorité.
Flâner un peu, changer d’humeur, justifier ce déplacement par quelque utilité…
Caissière endormie. Les payeurs se regardent de travers. Que d’agressivité pour quelques denrées !

Ok, c’est décidé, ce sera un café.
Il est tôt pourtant, le serveur fatigué ne m’a pas vue ? M’aurait-il effacée?
Lui aussi commence bien sa journée !
Avec mon  trousseau de clés je commence à tapoter cette table vide et mal nettoyée.

Je suis tendue. Je suis saturée.

Là, ce que je vois au loin va me faire basculer dans la colère bien cachée ,savamment maitrisée .

Vous voulez savoir ? Impossible !
Je ne voudrais pas vous agacer! vous bouillonner ! Peut-être même vous exaspérer, vous révolter.
Non aujourd’hui ce n’est pas ma journée. 



Texte de Mistraline

Certains mots sont des familiers, ils sont là, tapis dans l’ombre oblique du mur de nos humeurs. Ils sont le reflet d’un édifice érigé par nos agacements chroniques. En tête trônent l’irritation et l’exaspération, l’énervement côtoie l’agacement et le mot  ‟récurent” se pose en socle de ce monument de notre mécontentement.

Sur cette stèle toute personnelle, figurent en tête les bricoleurs du dimanche qui brisent ma quiétude à coups de scie hurlante, de chignole hystérique et de marteau rageur.
Les limaces voraces, les moustiques sanguinaires, les chenilles poinçonneuses, les mites alimentaires, ornent mon bestiaire des bêtes à abattre.
Mais il est un domaine où tout m’agace sans exception : la redondance des ronds-points, la cupidité des radars, l’apathie des feux rouges, la tyrannie des STOP, les bégaiements des passages-piétons… Oui, il est des domaines ou l’agacement file la métaphore avec emphase !
Quant aux banquiers infrangibles, aux chirurgiens désinvoltes, aux enseignants velléitaires, aux élus fallacieux et aux assureurs carotteurs, ils ont leur place au panthéon des empaffés qui me hérissent.
Le manque de tact, le manque d’éthique, les accords en toc, tout ça me débecte. Comme les sourires boutonnés, les rires perfides, les mains molles et moites et les regards torves.
L’effroyable goût de l’eau du robinet, le mimétisme sinistre des zones pavillonnaires, la futilité des programmes télé, la maigreur des canons de beauté, ça aussi, ça me fait grincer du bulbe.


Texte de Suzanne

Les petits désagréments de la vie quotidienne ont tendance à m’agacer, comme par exemple, les automobilistes qui prennent leur temps avant de démarrer au feu vert. Ils donnent l’impression de bailler aux corneilles ou de réfléchir à leur planning de la semaine, bref partout sauf au volant de leur voiture.

De même, m’agacent ceux qui roulent lentement à l’approche d’un feu de signalisation et qui soudain accélèrent à la dernière minute, vous laissant sur place devant un feu orange rougissant.

Ce même genre de personne n’hésitera pas à s’engouffrer dans la place de parking que vous convoitez depuis un petit moment, attendant patiemment que l’automobiliste précédant ait pris son temps pour s’installer confortablement, de vérifier qu’il avait bien son portable à portée de main ou son paquet de cigarettes, mis sa ceinture, s’être contrôlé la coiffure dans le miroir avant de démarrer enfin, faisant fi de tout respect pour celui qui attend en rongeant son frein. Et hop, voilà un culotté qui vient juste d’arriver et qui s’insère à votre nez et barbe.

Pour continuer sur le thème de la conduite automobile, ça m’agace également lorsque la voiture qui me précède tourne subitement à droite ou à gauche, sans clignotant. Ca me « chatouille », d’aller demander au conducteur si ses clignotants sont en option !

Il faut dire que l’univers clos d’une voiture, a tendance à nous faire réagir prestement devant la mauvaise conduite des autres ou leur manque de respect. Un autre exemple qui a tendance à me hérisser, c’est  le sans-gêne des fumeurs, qui sous le fallacieux prétexte que d’acheter leur poison ne leur prend qu’une minute, ne prennent pas la peine de chercher une place de parking et se garent en double file, créant parfois des embouteillages.

Le sans-gêne, mais aussi le manque d’éducation ou de respect d’autrui, a tendance à m’agacer.

Autrefois, dans un lieu public ou une salle d’attente de médecin,  les jeunes laissaient leur place aux personnes âgées. Maintenant ils restent vautrés sur leur chaise, les écouteurs vissés aux oreilles, jouant avec leur mobile ou leur I-Pad. Peu importe que la personne âgée  malade reste debout, ils sont arrivés les premiers, donc ils restent scotchés à leur chaise, c’est « leur droit ».

D’autres situations m’agacent, à savoir mon manque de chance quasi inné.au supermarché :

Il m’est impossible de trouver « le » caddy qui voudrait bien rouler droit  et ne m’épuiserait pas à pousser ou tirer, avec une curieuse démarche de crabe

Il y a systématiquement un problème à la caisse : un prix absent, la fin d’un rouleau de caisse et son changement,  un client en manque de numéraire ou qui a oublié un article et qui repart à sa recherche dans les rayons, tous ses achats déjà étalés sur le tapis roulant.

Bref, la liste peut être longue des petits inconvénients, des retards insignifiants qui nous pourrissent quotidiennement la vie, alors que nous devrions cultiver la « zen attitude » et profiter de ces petits moments d’attente imprévus, pour vivre en pleine conscience, faire le vide ou s’intéresser à ce et ceux qui nous entourent.


Texte de Françoise

Ah, c’que ça t’agace qu’on te dise « on lit vers 3 heures et demi » alors qu’on n’a même pas commencé à écrire. C’est vrai, quoi, c’est agaçant, quand on vient se détendre et qu’on est tout de suite stressée, rappelée à l’ordre par une consigne.

Un autre truc agaçant, c’est le mail. La correspondance par mail. T’es censée être en lien avec l’autre, avoir une réponse quasi immédiate et, de deux choses l’une : soit il met trois jours à te répondre, soit il te répond… en oubliant la question. C’est fatiguant à la longue.

Agaçant aussi ces gens qui ne terminent par leur pain à table. Surtout que tu leur sers du pain bio, donc forcément un peu plus cher. Enfin, ce n’est pas la question, plutôt une question d’éthique.

Agaçant encore les gens qui se plaignent du temps. Il ne va jamais le temps, comme un bikini à une grosse ou un décolleté plongeant à une maigre. Trop chaud, trop froid, trop humide, trop ceci… De deux choses l’une : soit on peut y remédier et on agit, soit on la boucle.

Ce qu’il y a de mijotant, par ailleurs, c’est l’attente. Attendre un résultat d’examen. Un examen médical ou un examen universitaire. On se demande à quelle sauce on va être mangé. C’est plus qu’agaçant !

Manger… pas un plat en sauce, jamais, mais manger devant la télé. Devant les info, histoire de s’informer. Voilà une chose que tu ne connais plus. Tu n’as plus l’image, seulement le son. C’est agaçant de manger devant un écran blanc. Même si ça évite d’avoir l’appétit coupé…

Alors, que faire ? Lire. Ca se termine souvent comme ça, la soirée. Mais non sans cet agacement récurrent que procure la perte des lunettes, mille fois égarées, mille fois retrouvées, dans les endroits les plus improbables. Il faudrait en dresser la liste, on gagnerait du temps.

Le pire, c’est quand tu ne trouves pas ton portable au fond de ta gibecière, et que tu es bloquée devant le nouveau digicode du nouveau copain d’un vieil immeuble parisien mal éclairé… sous la pluie, forcément. Pourquoi ?

Pourquoi ? Ne surtout pas tomber dans la série des « pourquoi » car, à chaque « pourquoi ? » correspond probablement un « comme c’est agaçant ! »
Pourquoi cette semaine a-t-elle été particulièrement pluvieuse alors que c’était TA semaine de congés ?
Pourquoi ton fils t’appelle-t-il pour annoncer sa visite, en ajoutant systématiquement qu’il va t’envoyer un sms pour repréciser ce qui ne l’a pas été et aurait pu l’être tout de suite ?
Pourquoi pars-tu toujours cinq minutes trop tard pour poster un courrier urgent ?
Pourquoi le chat s’arrange-t-il pour disparaître au moment où tu dois l’emmener chez le véto ?
Pourquoi ? Pourquoi ? C’est agaçant à la fin.



Texte de Marie-Hélène

Il est de ces petites merveilles de la vie quotidienne qui pourrissent les plus belles journées de l’année. Au sommet de l’échelle de meunier de mon agacement se trouvent ces chiens qui frétillent du croupion juste avant de déposer sur la chaussée ces choses malodorantes attirant inexorablement nos pieds aimantés. Gauche ou droit peu importe.
L’échelon inférieur supporte les hypocondriaques, les râleurs, les pleurnicheurs, les mal lunés à l’année, les empêcheurs de tourner en rond.
Puis viennent les snobs, les autoritaires, les arrogants, les savants qui ne cessent de donner leur avis et surtout font des grands discours en s’écoutant parler.
Un peu plus bas, les grands mots ampoulés, les humoristes sans humour, le vin rouge glacé, les carafes d’eau tiède en plein été.
L’insolence, l’irrespect, les rires graveleux sont des mouches collantes bien agrippées au même barreau, à mi hauteur.
Les stylos sans encre, les briquets vides mais rangés, les poubelles pleines sur le palier me font soupirer.
Mais l’allergie incurable qui me chatouille le neurone est le silence tonitruant répondant au bonjour aimable et souriant lancé à la porte de magasins bien souvent désertés.

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