15/05/2012 Chroniques du Royaume
Définition de la satire selon Patrick Rambaud : « La satire est
un texte qui cherche à fustiger les mœurs,
à exposer au jour les ridicules et les travers de nos contemporains,
principalement de ceux que gouverner fait enfler de la tête. L’idée m’en est
venue le soir des avant-dernières élections présidentielles, lorsque j’ai vu
apparaître sur nos écrans le visage de Notre Nouvelle Majesté. »
Patrick Rambaud a obtenu le prix Goncourt en 1997
pour La Bataille. Il est également célébré dans tout le royaume pour avoir dressé un portrait satirique de Nicolas Sarkozy durant son quinquennat dans Les chroniques du règne de Nicolas
Ier.
Voici un extrait de l’incipit des Chroniques :
« Sa majesté avait l’œil encapoté mais vif, quoique tiré vers le
bas, un nez qui pointait pour occuper tout le milieu du visage, le cheveu
sombre et ondulant comme des vaguelettes peignées. Même parvenu, Notre Précieux
Souverain ne trouva point la paix en lui-même, tant il restait secoué en
continu par des nervosités. (…) Il marchait des épaules, avec une façon
personnelle de se dévisser le cou, remuant par courtes saccades comme s’il
était engoncé dans un costume que lui taillait pourtant à ses mesures un
artiste italien en renom. Il ne tenait pas en place. Quand il parlait au
public, plusieurs fois dans une même journée, il se rengorgeait ainsi qu’un
pigeon et se livrait à de curieuses contorsions pour animer ses dires, dont la
teneur importait peu car ses discours valaient pour leur forme plutôt que par
un fond très changeant selon les auditoires ; pour cela il était bien pourvu
d’une panoplie complète de mines et de tics qui ponctuaient ses paroles, les
versant tantôt vers l’évidence, tantôt vers l’ironie, tantôt vers l’enflure. »
Versons à notre tour dans la satire et exposons notre vision de l'élection présidentielle qui vient d'avoir lieu !
Satire d'Anne-Sophie
Le Monarque était à peine plus
haut que trois pommes et supportait mal l’idée que le monde le surplombe.
Dès lors, il prit la décision les premiers jours de son règne, de rehausser ses
richelieus de talonnettes, de s’honorer d’une coquette rétribution et enfin de
se commander un joli et gros aéronef à la hauteur de ses fantasmes les plus
intimes.
Non content de ses nouveaux jouets
sa Majesté exigea d’avoir une belle et grande poupée avec qui il puisse se
distraire. Il la voulait issue du monde de la mode, avec une certaine
expérience de la bagatelle ainsi que celle de la bienséance. Une fois
invitée à sa table et l’affaire conclue, il choisit de sceller la suprême et
majestueuse union par une promenade chez Mickey et Monsieur le Pape.
Tandis que le roi savourait sa
victoire, son pouvoir, ses largesses et sa grandeur de prestigieux échassier,
les années s’écoulèrent rythmées événements grandiloquents, jusqu’à faire
venir ce célèbre dictateur du Moyen Orient contre un coffre à trésor, en
prévision de son prochain règne. Quelle concupiscence du trône ! Quelle
omnipotence ! Quelle omniscience ! Gloire à toi, ô souverain aux
grands talons de la petite France !
Rien ne te fait trembler, ni
ne t'émeus, surtout pas le doux et faible frémissement de tes opposants, qui
n’ont point ta verve, ni ton aplomb ! Et pourtant, l’ombre inoffensive
d’un saint François se rapproche et ton peuple se rallie lentement à son
mouvement. Jusqu’au dernier moment tu frôles à peine le sol, certain d’être
l’élu et tu ne vois point le visage cireux du prochain roi se profiler, ni tu n'entends la menace sourde de sa voix chevrotante.
Nicolas, le grand, le tout
puissant, qui croyait convaincre notre vieux
peuple de notre vieille France par ses invectives, son mordant
légendaire, nous voilà affublés désormais pour les cinq années à venir d’un
monarque au teint et au regard aussi vifs que ceux du musée Grévin. Il ne sera
point partout comme le précédent mais où sera-t-il vraiment ? Pourvu que
la cour de Versailles ne se limite pas à de la figuration…
Le Roi est mort, vive le
Roi !
Satire de Mistraline
L’an dernier le monde assistait au spectaculaire printemps arabe, cette année il a assisté au
printemps électoral d’une France qui vient de passer cinq années sous le règne
de sa Majesté Bling-Bling, Notre Illustre Souverain à talonnettes, grand chef
du clan des Macaques, fidèle du Fouquet’s et grand amateur de yacht.
La campagne a sournoisement commencé un an avant l’ouverture
officielle des festivités, c’était au
Sofitel de New-York en Avril 2011. C’est
là que le patriarche des Eléphants, lui sur qui tous les espoirs reposaient,
fut pris la main dans le sac, la paille dans le sirop, le knacki dans la mie, le
cornichon au bout des lèvres... C’est ainsi que le leader
si charismatique des Eléphants fut rayé définitivement du monde politique.
Depuis plus personne ne prend à la légère l’adage qui veut qu’un éléphant, ça trompe énormément.
Depuis plus personne ne prend à la légère l’adage qui veut qu’un éléphant, ça trompe énormément.
Après cet os dans la purée, cette fève dans la brioche, cette coque dans le nougat, cette mouche dans la crème, les Eléphants se tournèrent
désemparés vers un autre de leur leader, le beaucoup moins charismatique
chevalier de Hollande. Ce porteur de bannière, s’il n’était pas le premier
choix des Eléphants, leur assurait cependant la certitude d’une vie bien
rangée, d'un charisme de batracien, d’une braguette verrouillée et d’une libido de flan Alsa. Dès lors le
chevalier de Hollande porta les couleurs des Eléphants à bras le corps, sans
faillir mais… sans briller.
Face à lui, sa Majesté Bling-Bling se frottait les mains par
avance. Des mains entachées de pratiques sordides et d’accords indignes tels
ceux passés avec le bourreau Kadhafi,
sans qui la campagne de 2007 aurait été réduite à la portion congrue pour le
clan des Macaques.
Tandis que sa Majesté Bling-Bling se confortait de
certitudes en impostures, le chevalier de Hollande ne ménageait pas sa peine
pour tenter de faire reluire son blason ternie par une bonhomie de nain de
jardin. Le royaume n’attendait aucun miracle. Comme tout vieux pays, il a
toujours conjugué la suspicion et la désillusion au temps des grands
changements politiques. Mais la ferveur finit toujours par s’emparer du peuple
qui a invariablement envie d’y croire.
Sa Majesté Bling-Bling y croyait lui aussi en arpentant
fièrement son palais de l’Elysée. Jusqu’au dernier moment il dédaigna son
adversaire, le tout petit chevalier de Hollande, à qui il n’en doutait pas, il ne
tarderait pas à faire mordre la poussière.
Le soir du débat entre les deux hommes, la France oscillait
entre colique et nausée en les regardant
s’affronter dans les arènes crasseuses de la république. Sa Majesté Bling-Bling
se perdit en objections retorses et puériles promptes à désarçonner un adversaire
qu’il croyait timoré. Le chevalier de Hollande eut bien du mal à se remettre en
selle mais il y parvint après chaque scud.
Il remporta une sobre victoire.
Il remporta une sobre victoire.
Le soir des élections, alors que la Suisse et la Belgique
avaient déjà annoncé les résultats, la France retenait son souffle. Si les
partisans des Bousiers de la Marine donnaient leurs voix à sa Majesté
Bling-Bling, alors la France entendrait résonner pour cinq autres années les
talonnettes intempestives du plus minuscule président de la V république. Et
ça, c’était plus que la France ne pouvait supporter.
Le chevalier de Hollande détrôna de peu le président aux
talonnettes. A défaut de hourras, la France poussa un long soupir de
soulagement.
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