03/04/2012 Anatomie du monde





Dans la mythologie, le monde est souvent représenté par un homme, le géant Atlas.


Alors, si le monde était un corps humain… quel pays serait les mains, les jambes, le ventre, les pieds, les fesses, le pénis, les yeux et le sourire du monde ?


Bonne auscultation !!


Texte de Marie-Raphael


Invitation au voyage

 Tu viens de quitter le lit, ta place est encore toute chaude, pourtant tu me manques déjà.
Je passe ma main sur l'oreiller puis sur le drap, les plis dessinent une sorte de carte du tendre. Ton empreinte m'embarque pour un tour du monde des sensations.
J'imagine ton sourire dessinant un arc énigmatique à la manière d'un bouddha chinois, plein de gourmandise et de générosité. Poursuivant mon aventure sensuelo-tactile, je passe le Caucase et me retrouve dans ta steppe. Doux mélange de vastes étendues et de végétation rase sur ton plateau ventral. Mon exploration va plus avant et enhardie je franchis ton Oural, deux chaînes de montagnes se conjuguant pour former une vertigineuse chute de reins. Plus curieuse que jamais, mes doigts glissent le long de tes jambes dorées comme l'évoque le Chili et son climat si doux. Je remonte doucement la Cordillière des Andes pour aboutir à ta Terre de Feu, haut lieu de ta puissance masculine. Je m'attarde réchauffée par ton soleil et repars lentement plus au Nord. Je longe la côte dans des zones plus calmes pour camper un instant au creux de ta mangrove sous les palétuviers. Leurs racines ligneuses m'enchassent, petit poisson pris dans ta nasse. Un instant ton étreinte désserrée, je m'échappe pour contempler ton regard. Deux fentes bridées me transpercent pour toucher mon coeur comme l'oeil des sages hindouistes et me fait ainsi accéder au nirvana.





Texte de Myriam :
 Si, toi, Monde, tu étais un Homme, tu serais façonné de pays chauds, de contrées froides, de terres arides, de terres fécondes.

Berceau des génies, l’Autriche t’aurait fait don des mains d’Amadeus, celles qui courent sur le clavier, expertes, véloces, nerveuses.

Tes jambes viendraient du Canada, robustes, supportant l’extrême, arpentant les vastes forêts, traversant lacs et rivières, à l’allure d’un loup.

Les dunes du Sahara modèleraient ton ventre, étendue infinie de sable fin aux couleurs ocres frôlé d’une brise légère. Dune étoilée ou crête dunaire, elles seraient le feu de l’émotion.

Tes pieds s’ancreraient dans cette douce Italie, sur les ruines d’une ville antique, sous le charme d’un sfumato de Vinci, ou la lumière vénitienne d’un Tintoretto.

Si le Brésil devait créer une partie de ton corps elle se réserverait sans aucun doute le rebondi de tes fesses.

Il y a sur l’île de Pâques, ces moaïs, nombreuses et fières sculptures mégalithiques de basalte, érigées, qui se prêteraient au jeu de donner naissance à ton pénis.

La Sibérie t’offrirait dans un écrin de velours deux yeux teintés de glace et de bleu.

Et juste un peu plus bas de ton visage, l’Australie mettrait en lumière ton sourire, à l’image féérique de ces rivages de mangroves et de baies idylliques.



Texte de Mistraline :
Si le monde était un homme, il serait hermaphrodite. Dans sa générosité il n’aurait pas su trancher, entre un clitoris ou un pénis.

Pour avancer le monde a besoin d’impulsions, de pulsations, de fougue et de fureur. Ses racines sont implantées en péninsule ibérique. D’ici, le monde fait claquer ses talons, cognant la terre à la clameur des chants humains.

Les jambes du monde sont très longues et leurs muscles sont saillants. Elles courent vite, elles sautent haut, elles dansent en rythme. A chacune de leur percussion, le globe accuse les répercussions des envolées originelles de l’Afrique.

Le fondement du monde est couleur chocolat... Sa rondeur, sa beauté, son accent latino et son petit déhanché très Copacabana attire les touristes du Brésil à Cuba !

L'utérus du monde siège au creux des dunes entre courbes et creux ondulatoires. Il sourit du bouts des lèvres quand l'honore le soleil cinglant des horizons maghrébins.

Le pénis du monde arbore une arrogance touchante. Il chante la passion et l’ardeur au son des mandolines mielleuses, pas très loin d’une Venise aguicheuse et sans doute en gondole sur des flots sensuels… Il est l’obélisque au débotté, quelle belle arlequinade...

Les petites mains du monde sont les plus cursives, sans cesse à l’ouvrage telle une armée de fourmis rouges enrôlée par un Mao Tsé Toung aux penchants entomologiste. Depuis les mains du monde se sont perdues dans les marécages du capitalisme délaissant les contrées bucoliques des poignées de mains et des accolades.

Le ventre du monde rime avec gigantisme ; il dévore et il nourrit, il est aussi grand qu’il est petit, c’est un gargantua en bas âge,  une alternance de paradoxes et de bon sens. Sa beauté n’a d’égal que sa laideur, sa cruauté copine avec sa démence ; orgueilleux, il siège  à la maison blanche sur une chaise électrique.

Le sourire du monde est fragile comme une île à la dérive, un bout de terre isolé, perdue dans l’immensité. Il a l’éclat de ce qui est précieux. Eclat qu’on voit briller dans les yeux des malgaches du monde entier.
Les yeux du monde sont de glace mais leur regard est de feu. Ils ont la clarté de la Volga en été et la luminosité des plaines immaculées. Ils voient tout, du Kremlin jusqu’aux steppes infinies de l’oural.

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