06/03/2012 Exit les auxiliaires



Aujourd’hui le travail d’écriture consistera à n’employer ni le verbe être, ni le verbe avoir. Cela va radicalement changer votre façon de penser ! L’exercice est à la fois très contraignant et très libérateur. La difficulté majeure sera la fluidité du texte, on ne doit pas sentir que vous avez peiné pour le rédiger.


Texte d'Anne-Sophie


En tête-à-tête avec un prédateur

Les lumières s’éteignent, enfoncée dans le fauteuil rouge, je plonge dans le film.
L’homme apparait dans son plus simple appareil, bien bâti, il fait naître l’envie. Mes yeux s’arrondissent doucement, mes pupilles se dilatent. Il se passe quelque chose d’étrange, je retiens mon souffle, j’attends la suite.
Il collectionne les femmes, il ne supporte pas le manque, la solitude. A chaque heure, il comble le vide avec méthode. J’observe ce mâle consommer du sexe comme un boulimique devant son assiette. Peu à peu il m’apparait fragile, dépendant et dominateur à la fois. Mais plus je le regarde, plus je me sens devenir sa proie.
Malgré l’abus qu’il en fait, son charme me fascine, son regard provoque le désir, traduit des pensées qui vont au-delà de l’imaginable.
Je réalise sa faiblesse, sa névrose mais son magnétisme opère encore, jusqu’au moment où il devient impuissant quand la relation ne se compose pas que de sexe...
Il se déteste, il souffre, il passe la nuit dans les milieux les plus noirs, les plus obscènes, les plus dépravés où seul son cerveau reptilien s’exprime.
Pétrifiée dans le fauteuil rouge, je retiens mon souffle, l’homme se transforme en brute épaisse poussant au dégout, sans âme, forniquant avec tout ce qu’il trouve. Il se punit, se méprise, se fait souffrir face à l’échec de sa vie sentimentale qui le torture. Il me donne envie de vomir tant sa violence se répand sur l’écran.

Une heure trente plus tard le générique revient, et je respire enfin.



Texte de Mistraline

Larmes des filles

Au Navire, le petit cinéma albenassien, Le film va commencer. Fabienne et Nadia assises à côté de moi, préparent les munitions : un paquet de kleenex pour chacune. Elles connaissent déjà le film, ça fait trois qu’elles le voient. Nous assistons donc à la projection de Devdas, du pur Bollywood sirupeux qui va durer quatre heures. On en rit aujourd’hui mais nos larmes d’alors abondèrent plus que de raison. Ceci dit, cela reste un formidable souvenir. Trois filles en crue, submergées par leurs émotions…  soudain captives des sentiments fleurs bleus sur grand écran.
On danse beaucoup à Bollywood, on chante pas mal, on tombe amoureux, on complote, on perd l’être aimé, on déprime, on se meurt mais on finit toujours par ressusciter. Vous imaginez bien que quand ça dure quatre heures, la séance se change en supplice ! Attention caramels mous s’abstenir…
Mes yeux semblaient atteints de myxomatose après ça, mes poches débordaient de mouchoirs détrempés et mon cœur éprouvé me suppliait de ne jamais recommencer.
Douze ans plus tard, j’achetais le DVD de Devdas, histoire de visionner à nouveau l’objet de feu, mes lamentations lacrymales. Pas une larme, entendez-vous ? Pas une. Aussi incroyable que cela puisse paraître, l’expérience prit une nouvelle tournure. J’observais les danses avec minuties, délaissant le fil du récit et les trémolos pathétiques qui jadis m’avaient plongée dans un chagrin abyssal.
Comme quoi les larmes de filles vont et viennent, au gré des tourments et des sentiments.
Mais pleurer en chœur... quelle ivresse ! Quel bonheur !

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