03/04/2011 Quand la ville parle


1/ Coeur de ville

(30mns d’écriture)


Fragmentation constructrice où comment aiguiser son regard :


Pour capter « la ville », rien de tel que l’immobilisme. L’idéal pour ça, c’est la terrasse du café !


Nous écrirons en faisant un inventaire précis de ce qui est devant nous, à droite, à gauche, partout où notre regard se porte, en suivant les traces de Claude Simon dans « Jardin des plantes » (1998).


Contrainte : sortir de la narration traditionnelle linéaire.


Extrait :

Hangars – gare de marchandises – multitude de voies

Entrepôts – HLM

Poste d’aiguillage

Terrain vagues – usines

Pavillons – jardinets

Gazomètres – ligne à haute tension – pylônes

Usines – clôture en plaques de ciment

Pavillons pierre meulière marron ou crépis gris-noir

Cimenterie – linge rose qui sèche (gardien ?)

Garage en briques : cour pleine d’autos à la casse




Texte de Francine


Le grand café d’Uzès



La terrasse – tables blanches encadrées vert – chaises cannées montant en bois – barrière croisillons


A gauche – trois consommateurs – un chien – tasses à café – soucoupes – cuillères – verre de vin blanc – façade en pierres – devanture de brasserie – étage – fenêtres à claire-voie – cheminée muette – grille de protection – solarium en toiture


Route passagère et bruyante – voitures garées – panneau de stationnement – alignement de carrosserie


Devant – banc public – lecteur de journée – fontaine – statue de femme avec amphores – autre terrasse de café – tables rondes – fauteuils blancs – consommateurs jeunes – bavards – fillettes animées


A droite – office du tourisme – enseigne – porte verte – devanture vitrée – drapeau européen – murs de pierres claires – niche – ouverture ronde – platanes qui s’effleurent – guirlande de lumignons – pigeons voletants – piétons pain à la main – courses diverses – nonchalant


Derrière – colonne Morris – publicités – restaurants – rue montante – quads et motos


A loin – escalier montant – mairie – emblèmes de la République – boîte aux lettres jaune – ruelle en enfilade.






Texte de Monique

- soleil printanier - place Albert 1er à Uzès - fontaine de la Dame sans eau



- pigeon sur la tête de la Dame


- cinq cafés avec terrasses bondées - un bistrot fermé


- consommateurs/fumeurs à l'air libre


- terrasse de la Brasserie Uzétienne de l'autre côté du boulevard


- allées et venues de la serveuse qui slalome entre les voitures


- ambiance détendue - bavardages - rires - deux gamines bruyantes


- un nouveau voisin de table au rire gras


- motos pétaradantes - voitures freinées par piétons peu pressés


- affiches de cinéma sur la colonne Morris - rue Xavier Sigalon enseigne du cinéma


- trois marronniers en pleine éclosion nous envoient des petits signes végétaux


- mairie ornée des trois drapeaux français, européens, occitan


- office de tourisme également orné offre ses infos informatisées en vitrine


- badaud lisant les affichettes de l'agence immobilière


- trois bancs de pierre




Texte de Mistraline


Uzès – place Albert I – dimanche matin



Rue Xavier Sigalon un scooter se gare


Un soixante, dit la serveuse – un type raconte les conditions de vols avec Ryan Air


Boulevard Gambetta ensoleillé


Quatre terrasses de cafés – deux bancs en pierre – deux platanes – fils électriques – projecteurs – fontaine circulaire – statut d’un verseau féminin – vert sapin


Enseigne : la sorbetière, torréfaction – brasserie Uzétienne à gauche – vieux café d’Aniathazze plus bas – Bengali en face – bar de la fontaine à droite – derrière nous crêperie la Bolée


Ciel bleu pâle – femme au châle turquoise – caraco anis – pull framboise – jupe safran (coupe de glace ?)


Au dessus de nous – nid suspendu – œil de bœuf – pollen de platanes – pluie de pollen


Quatre types à gauche – « on est vraiment devenus des gars du sud » - « le belge est parti » - « j’sais pas c’qu’il boit »


Borne toutounet – poubelle vert d’Uzès – parking vélos


Façades crème – pierres taillées – volets bleus – volets blancs – volets verts


Mairie – drapeau protestant – drapeau bleu blanc rouge


Panneau de restaurant – fausse ardoise – dix euros souris d’agneau aux herbes


Longue allée de platanes – camping car – défilé de voitures


Presse – tabac, présentoirs de cartes postales – enseigne Casino


Pigeons voyeurs



2/Diaporama citadin


(45mns d’écriture)





Utiliser la césure focale :



Chez Leslie Kaplan, dans « Le livre des ciels » (1984), on trouve un emploi omniprésent de l’adjectif. Parfois dédoublé ou triplé pour déporter l’image hors de l’usage qualificatif attendu : « Dans la ville, le ciel est courbe, éloigné. »

 
L’auteur s’applique aussi à maintenir un rythme "cassé" qui invite le lecteur à former dans son esprit la vision qu’elle dépeint.



Contrainte : utiliser notre inventaire pour cet exercice qui requiert des phrases courtes, simples, nourries d’indications par la succession d’adjectifs, renforçant l’image, sans pour autant alourdir la prose.






« On a souvent rendez-vous en haut de la rue.


C’est un carrefour hétéroclite, ouvert.

Au loin un immeuble inachevé, une construction.


Les fenêtres sont dessinées, des trous.

La rue longe un hôpital, nom historique. Une cheminée rigide sort du fond.

Des femmes passent très belles, avec leur veste sur les épaules. Je vois leur air étonné, leur collier en or.

Monde en fissures, ruines intérieures. Des palissades en bois.


Je vais aux limites de la ville.
Limites grises, urgentes.
Je ne connais pas. 










Texte d'Evelyne


Du haut du balcon…




C’est le rendez-vous de l’écriture, balcon de la mairie.


Assise sur la rambarde, dure, froide, à l’ombre.


Nous sommes sur la grande rue bordée de platanes printaniers.


Au pied des platanes un long serpent métallique, file de voitures stationnées.


Un automobiliste s’arrête, quelques phrases échangées ; charmant et plein d’humour.


Aujourd’hui dimanche, boutiques fermées, éteintes.


Seuls les cafés ont le sourire.


Les terrasses affichent le programme : ensoleillé et paresseux.


Devant moi les arbres, une ligne vert tendre tracée dans le ciel bleu, timide, délavé.




 
 Texte de Francine


Uzès Cité ducale

Le grand café invite par sa terrasse pleine
Des voitures à l’arrêt, encolorent la rue
Une rue passagère aux touristes nonchalants

Une vieille femme usée, jupe longue, chignon tressé
Une boulangerie à l’arôme de froment
Des motards encasqués et en blouson cloutés
Un scooter, destrier enchaîné, attend son chevalier sur le trottoir pavé
Un charmant escogriffe drague les écolières
Distrayant les esprits volatiles en odeurs printanières

La fontaine tarie dresse sa puisatière
Des jarres vertes et vides à ses bras accrochées

La colonne Morris s’érige sur la place
Informations offertes au passant indolent

L’horodateur en congé dominical
La douceur médiévale de la cité ducale




Texte de Monique



- la verte pharmacie de la mairie n'est pas de garde, un client lit le tableau des permanences

- des touristes entrent dans la cour restaurée de la mairie allant vers le Duché; d'autres en sortent l'oeil rivé au plan de la ville


- beaucoup de voitures du dimanche avec quatre ou cinq passagers dont des enfants

- derniers acheteurs sortant du traiteur Hurard avec des petits paquets noués

- un "officiel" (cocarde sur le parebrise) range sa voiture le long de la mairie et plaisante avec le groupe "Il relèvera les copies dans dix minutes !

- les terrasses des cafés se vident après l'apéro prolongé

- quelques instants uniques mais fugaces : ni voiture, ni moto...





3/ La ville dans son ensemble


(65mns d’écriture)





De l’importance de prendre de la distance pour évoquer l’ensemble :



En parcourant la ville vous choisirez neuf lieux pour écrire votre vision personnelle d’Uzès. Neuf lieux évocateurs qui seront aussi le lieu d’une confidence. Pourquoi cet endroit et pas un autre ?


Contrainte 1 : vous emploierez le « tu » à la manière de Guillaume Apollinaire dans « Zone » (1913), dont je vous ai mis un extrait plus bas.

 
Contrainte 2 : vous clôturerez votre texte par un mot que vous aurez demandé à un passant, le mot qui, d’après elle ou lui qualifie le mieux la ville.




Extrait de Zone :


« Maintenant tu es au bord de la méditerranée
Sous les citronniers qui sont en fleurs toute l’année…
(…)
Tu es dans le jardin d’une auberge aux environ de Prague
Tu te sens tout heureux une rose est sur la table…
(…)
Te voici à Amsterdam avec une jeune fille que tu trouves belle et qui est laide…
(…)
Tu es debout devant le zinc d’un bar crapuleux
Tu prends un café à deux sous parmi les malheureux. »



Texte de Monique :

Quel tour tu m'as joué chère ville d'adoption que j'arpente depuis vingt deux ans.



Tu m'offres chaque jour un lieu surprise et tu me demandes de choisir mes neuf lieux préférés.


Tu peux imaginer ma vie après un tel choix : le Duché oublié; la tour Fenestrelle passée sous silence; la tour du Roy dominant le merveilleux Jardin médiéval me fermant sa porte; la place aux herbes furieuse de notre trop court passage; la tourelle de la médiathèque surmontée d'une Vierge m'en interdisant l'entrée...


Tu vas être déçue mais ce que j'aime le mieux à Uzès, c'est d'y vivre tout simplement !


Quant à la charmante dame portugaise vivant à Uzès depuis trois générations, elle te trouve "historique" !


Essaie de rester modeste quand même et à ne pas devenir une ville-musée sans jeunes, sans activités autres que....touristiques !








Texte de Francine





Maintenant tu es dans cette belle ville d’Uzès. Imagines la Rue de la République entièrement rénovée, avec ses portes ouvrant sur ces cours intérieures et des escaliers renaissance, qui descend lentement pour s’épancher sur la Place aux Herbes, vaste espace à ciel ouvert en centre ville, ceint de toutes parts par des arches voûtées accueillant  des commerces aux couleurs méditerranéennes. Savais-tu qu’anciennement cette place abritait le gibet qui servait aux exécutions publiques ? La fontaine pleure ces pendus innombrables.  
De là on aperçoit la Place Dampmartin, où fut assassiné l’ancien maire, et la Tour de l’Evêché avec son clocheton qui se détache sur le ciel déchiré, tout à côté du Duché.
Tu t’engages dans la rue de la Pelisserie qui, comme son nom l’indique, était le lieu où travaillaient les tanneurs, les peux pendaient entre les murs et le vent chassait les odeurs nauséabondes. Tu peux voir d’ici le dôme de la médiathèque et a statue de Notre Dame du Bon Secours.
Tu prends ensuite la rue Port-Royal pour te rendre au Jardin Médiéval. Jardin où officie Sylvian qui connaît les petites et la grande histoire de la contrée. L’ancienne prison d’Uzès s’est transformée en un lieu calme et serein où les plantes d’un autre âge prennent un regain de jeunesse. Là se dresse la Tour du Roi, véritable cœur de la ville et sa vision panoramique. On accède à la cime de la tour par un escalier en colimaçon taillé dans la pierre. Différents paliers s’ouvrent sur des salles d’anciennes cellules, mais l’effort est récompensé par une vue exceptionnelle sur la ville et ses alentours.
Si le cœur t’en dit, tu descends la Calade Saint Théodorit et tu découvres la fontaine de la cité.
Tu continues pour te rendre à la Tour Fenestrelle, où s’appuie le presbytère, non loin de la Folie du baron de Castille.
Enfin te voici à la promenade Racine où le pavillon éponyme fait face à la vallée de l’Eure qui, toute entière, s’ouvre à toi.
Grandeur et majesté de cette ville magique. C’est un lieu très accueillant, et comme me l’a confié un couple de visiteurs, on pourrait l’appeler « Uzès la belle» !


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