17/01/2011 Mots oubliés

 Texte improvisé, sans autre contrainte que d’utiliser le plus de mots inusités de nos jours dans la langue française.
On peut même envisager de les faire parler !


Texte de Maria

Conversation

Ils étaient trois dans un angle du salon, absorbés dans leur conversation, étrangers aux  visages austères des ceux qui circulaient dans la maison et dans la pièce.  
L’homme de droite  paraissait offusqué, il faisait des efforts pour ne pas monter le ton, et cela se devinait sur la couleur de son visage qui virait au purpurin.

- « Pourquoi ne pas appeler les choses par leur nom, disait-il, c’était un faquin, on ne lui connaissait aucune passion, aucun dévouement, il répétait les mêmes mots en toutes circonstances, quand on sait que certains chiens peuvent comprendre jusqu'à mille cinquante mots on mesure mieux la médiocrité de son langage. Je n’ai jamais côtoyé quelqu’un d’aussi mortel et ennuyeux, vous savez bien que, des que nous l’apercevions, nous courrions nous cacher avant qu’il ne nous transmette  sa platitude doublé d’une chape de plomb... »

- « Moi je ne dirais pas faquin,  l’interrompit celui qui portait un blaser bleu sur un pull gris col roulé , parce que ce n’était pas un coquin, ni une canaille, ni un gueux, pour moi il était pusillanime ; coincé dans ses fringues convenues mais de marque, toujours occupé a remettre en place la mèche que lui tombait sur le front, ses mains trop blanches tremblaient quand il allumait une cigarette, je ne l’ai jamais vu prendre une initiative ni se mettre en danger.
Le pauvre type n’avait pas la faconde, tout en lui était difficile, noué, enfermé, même quand il transpirait, ça se passait à l’intérieur, ça ne mouillait pas sa chemise, ça ne sentait rien. »

- « Avec la position sociale dont il avait hérité, renchérit le troisième,  faisant chauffer un verre de cognac entre ses mains, il aurait pu être content de soi, arrogant, orgueilleux, comme fat mais il avait un mal fou à exister. Souvenez-vous qu’il a passé son temps dans les salles de jeux jusqu'à en perdre sa fortune. Comme il  ne savait rien faire, son copain du ministère lui a trouvé, par pitié, un poste de tamponneur dans une administration ; il passait la journée assis à tamponner des lettres et des documents… »



- « D’accord, coupa le rougeaud, dont le visage chauffait à cause du scotch, mais il faut que nous décidions ce que nous allons faire graver sur sa pierre tombale. Qu’est ce que vous pensez de «  Faquin, Fatal et Funeste » ? »

- « Non, dit le troisième qui n’avait pas supporté de se faire couper la parole, écoutez ceci :
« Regimbe –toi mais ne tamponne pas!
   Lève-toi et marche!
   Sort de ton cercueil de soi ! »

Et  tous les trois éclatèrent de rire.


Texte de Dominique


Emelyne lança un regard goguenard à lʼespèce de faquin qui bredouillait, les yeux baissés, un pauvre bouquet dʼimmortelles à la main. Elle prit cependant les fleurs et avec faconde le congédia dʼun sourire. Les lèvres purpurines dʼEmelyne avaient la sensualité
dʼune gourgandine. Tout son être respirait la fruition de la vie. Mais elle nʼaimait pas perdre son temps, bobillonner, tâtonner comme ce pauvre être plat, triste, pusillanime qui semblait ne pas faire cas de son désir à elle. Elle lui fit part dʼun air gouailleur que son temps était écoulé, quʼelle nʼavait pas lʼintention de lantiponner avec lui. Il sortit enfin de sa loge et lʼespérait elle de sa vie.
OK, cet homme avait été une bénédiction, lorsquʼelle crevait la dalle en poussant ça et là une petite goualante contre un repas chaud ou un café-crème. Il lʼavait pour ainsi dire sortie du ruisseau, recueillie chez lui en plein hiver. Elle sʼétait refait une santé. Mais elle savait les hommes embabouineurs, sʼil sʼétait embâté dʼelle, cʼest quʼil avait une raison. Et elle lʼavait satisfaite cette raison. Pendant trois mois, elle sʼétait laissé faire faire lʼamour par cet olibrius afin de ne pas crever de froid. Donnant-donnant, elle avait payé sa dette sans regimber. Puis il y avait eu cette rencontre, un ami à lui qui tenait un petit club, sa proposition dʼun tour de chant, des applaudissements, des rappels, un contrat, puis un autre et enfin le succès. Un appart à elle, du fric. Elle lui avait dit “Bye-bye”.
Ils ne sʼétaient pas harpaillé, loin de là. Ils étaient quittes après tout cʼétait loin dʼêtre une gouape, juste un peu sangsue, un peu amoureux également. Mais ça cʼétait son problème. Il lui avait
servi de factotum de longs mois. Il avait peut-être du mal à lâcher le morceau.
“ Faudra quʼil sʼy fasse, il nʼest pas imbriaque après tout. “
AU-REVOIR



Texte de Francine


L’histoire se déroule au temps de Sherlock Holmes, à Paris, ville lumière de ce siècle où toutes les petites frappes, les gouapes et filles de joie se côtoient en bonne intelligence.


Felipe, pousseur de goualante de son état, déambule dans Montmartre, la fleur aux dents, l’œil goguenard. Il a repéré une jeune provinciale qui arpente les pavés de la place, le regard émerveillé par les peintres et peinturlureurs de couleurs. Felipe maîtrise le bagou et à la faconde facile. Son esprit aventureux est piqué au vif face à cette gageure de tâter de la donzelle.

En quelques ronds de jambe il fond sur sa proie et se fend de son plus éclatant sourire. A force de rodomontades, il espère attirer l’attention de la bourgeoise. Une fois le cil levé, son magnétisme accroche la pauvre victime et le tour est dans le sac !

Sifflotant, les mains dans les poches tout en se gobergeant, plus infatué que le roi de cœur, Felipe aborde la jeune fille et déclame son baratin en diatribes bien rodées.
La petite provinciale, timide et pusillanime, rosit sous son teint de porcelaine où les lèvres purpurines appellent le baiser.
Quelques gourgandines habituées au manège de Felipe prennent des paris sur la conclusion du faquin de charme.

Surgit de nulle part, en moins de deux secondes, le chaperon tel une mère maquerelle rabattant sa couvée s’interpose et toise le freluquet. En factotum efficace il fait rempart de son corps. Sentant son coup lui échappé, Felipe bat en retraite sans chercher à combattre.

Paris offre tant de possibilité, pourquoi essayer de lutter ? Felipe sourit, tire sa révérence et s’en va conter fleurette à une dame d’un âge certain qui lui assurera, c’est gagné, un bon repas pour la soirée.

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