7/06/2010 Scène de ménage
Les propos que s’échangent les protagonistes sont dénués de vulgarité mais ils sont d’une rare méchanceté.
« Le mariage est une expérience chimique dans laquelle deux corps inoffensifs, peuvent, en se combinant, produire un poison. » Edouard Pailleron
Texte de Ben
Où sont passées les heures qui ont renversé l’horloge ?
Où sont passées les minutes qui peignent les cadavres de nos idéaux ?
Où sont passées les secondes qui font du temps un instrument des sables, un outil de vision ?
Et il vit Zion, la grande, l’unique, la terre neuve, celle qui, en dépassant les pleurs, a vu l’homme , pris de dépit, s’arracher son troisième œil. Mais là n’est pas la question ! on parle ici d’un appel qui vous poursuit, un débat frénétique où se joue la vie ; non pas celle d’un être humain, mais plutôt celle d’une entité.
Quand deux personnes s’unissent, une troisième se crée. Il est, dans le commencement d’un couple, à l’état embryonnaire ; se développe à force de compromis, de douleurs, d’amour, de moments passés à écouter et accepter l’autre.
La troisième entité, l’unité tertiaire, est quelque chose qui ne peut exister sans la conscience que nous ne serons jamais vraiment accompagnés par quelqu’un ; nous sommes, tout le temps, tous, tout seul en nous-mêmes. L’unité tertiaire est la partie qui crée le lien permettant aux deux composantes de ne former plus qu’un. L’unité tertiaire est différente de chacune des unités qui la composent. Il est donc possible aux unités composantes de se perdre dans l’unité tertiaire et de s’oublier. Pour l’unité composante auquel cela arrive, il s’en suit une dépendance. Dépendance affective dans le sens où, le manque à être est dû à l’oubli de sa propre identité, et, va être exprimé par une dépendance à l’autre.
C’est ainsi que le dialogue commence :
-Tu te crois beau avec ton K-way ? dit Nicole. Alors là, André, ‘y dit :
-Ouais !!!!
-Tu ne respectes pas mes droits, tu ne respectes pas mes choix !! Comment veux-tu qu’un belloutre puisse vivre avec toi ?
-Tu penses trop à ton pamplemousse qui te sert de ganache !!
… Stoop ! remarquez la tournure que prend cette conversation. L’aspect superficiel du ton de la femme et l’aspect basique, voire primaire de l’homme, André. Il en va, logiquement, que, réfugiés dans l’orgueil qui les étreint, drapés dans des regards hautains et dédaigneux, leurs rêves étaient bafoués par le visage vulgaire de leur réalité.
- Puisque c’est comme ça, eh bien, je te….
Aaha ! Instant fatidique, où l’on pourrait croire que ceci est la fin du commencement de l’histoire qui n’a ni fin, ni commencement.
Que nenni ! le sujet femelle, Nicole, prit conscience, dans une fraction de seconde, que l’univers entier ne tournait pas autour du dépeçage d’animaux à la douce fourrure. C’est alors que son goût pour la blague mesquine bien placée entre les deux jambes de l’ego de l’homme, lui fit apparaître un sourire qui ferait passer Klaus Barbie pour un vendeur de marguerites. Elle dit de ces mots dégoulinants :
-Sinon j’ai qu’à prendre ta peau de singe pour m’en faire des gants en cuire…
De peur, André se déchire, puis se rafistole aussitôt. Pris d’un foutu fou rire, très vite accompagné par les gloussements de sa concubine, ils finirent leur histoire dans de beaux draps.
Moralité : ne jamais chasser l’ours quand on n’a pas le fusil.
Texte de Mistraline
Mauricette et Paolo s’affairent en cuisine, ils mettent la dernière touche à leur plateau d’apéritifs. L’espace qui est contigu rend la tension palpable. Entre ces deux là, il y a comme un courant de haute tension.
En terrasse, les invités plaisantent et se brocardent, en attendant leurs hôtes.
En cuisine Mauricette ouvre les hostilités :
- Paolo, dépêche toi un peu.
- Oui, oui… se dépêcher, toujours se dépêcher conclut-il, se parlant à lui-même.
Mais Mauricette aux aguets, remet ça :
- Monseigneur daignerait-il accélérer la cadence ?
Paolo :
- La Pompadour cessera-t-elle de toujours ordonner !
Mauricette :
- Paolo ne me cherche pas !!
Paolo :
- Mauricette ne commence pas.
Mauricette :
- Tu es d’une telle vivacité mon pauvre vieux, c’est renversant.
Paolo :
- Mais j’ai le temps moi, je ne suis pas quillé en mode speed.
Mauricette :
- Ah c’est sur ! Avant que tu ais fini de servir l’apéro, les glaçons seront rentrés au Groenland à la nage.
Paolo :
- Ça fera le spectacle.
Mauricette :
- Ce que tu peux être fatigant !
Paolo :
- Tu vois le gravier qui jonche ma route mais pas le menhir qui barre la tienne… c’est drôle tout de même.
Mauricette :
- Aurais-tu des reproches à me faire Paolo ? Vas-y, ne te retiens pas, je t’écoute.
Paolo :
- Tu n’écoutes jamais que toi Mauricette. A quoi bon essayer d’en placer une tu n’es qu’une boîte à blabla.
Mauricette :
- Oh comme tu es mesquin ! Tu disais que tu aimais m’écouter parler, que cela suffisait à ton bonheur.
Paolo :
- Oui mais ça c’était avant que je te pratique au quotidien. Maintenant je dirai que je pourrai aisément me contenter de te regarder dormir.
Mauricette :
- Toi, même quand tu dors tu es exaspérant !
Paolo :
- Pourquoi, parce que je ne t’écoute pas ?
Mauricette :
- Parce que tu éructes toutes sortes de sons disharmonieux, de la glotte aux narines. Autant dire que je partage mon lit avec une ménagerie.
Paolo :
- Tant que ça ne sent pas le fauve, je ne vois pas de quoi tu te plains.
A ce moment là, un des invités fait irruption dans la cuisine et met fin au débat. Mauricette s’empresse de lui tendre le plateau chargé de verres et de glaçons avant de l’envoyer rejoindre les autres invités. Aussitôt Paolo, lui emboîte le pas.
Mais Mauricette le rattrape par le bras.
Mauricette :
- Où tu vas ?
Paolo :
- Où je vais ? A Wimbledon, tiens !!
Je vais boire un coup avec les autres, où tu veux que j’aille ?
Mauricette :
- Aux fourneaux, ça te changera de destination. Filet mignon et pommes de terre rissolées, allez au boulot Coco, moi j’ai la boîte à blabla qui tambourine.
Paolo :
- Mauricette, sois pas vache ! On va pas se fâcher pour des broutilles.
Mauricette :
- Ah mais je ne suis pas fâchée Paolo, tu penses ! Pour une fois que c’est moi qui vais me rouler les pouces…
Paolo :
- Tu ne vas pas me laisser tout seul, dis ?
Mauricette :
- Non, le four te tiendra compagnie, tu vas voir, c’est une vraie tombe.
Sur ce, elle rend son tablier et tourne les talons, direction l’anisette et ses frais glaçons.
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