25/01/10 Récits insomniaques

Autour de l'homonymie et de l'insomnie...



Seul dans le noir de Paul Auster


Extrait :


« J’éteins, et me revoilà dans le noir, enfoui dans cette obscurité sans limites, si apaisante. Quelque part, au loin, j’entends passer un camion qui roule sur une route de campagne déserte. J’écoute le va-et-vient de l’air dans mes narines. D’après la pendule sur ma table de nuit, que j’ai consulté avant d’éteindre, il est minuit vingt. Des heures et des heures jusqu’à l’aube, j’ai encore devant moi le plus gros de la nuit… »



C’est la nuit et pour X raisons, vous ne dormez pas. Votre récit aura une particularité, il sera ponctué d’homonymie.


Exemple d’homonymie :

Extrait d’Aragon, dans Nuits d’exil.

Ces nuits t’en souvient-il. Me souvenir me nuit
Et tes lèvres tenaient tous les soirs le pari
D’un ciel de cyclamens au dessus de Paris



Texte de Mistraline


Quand Morphée se fait prier…

Je m’allonge et le lit grince sous mon poids.

Faut vous dire que je ne suis pas la princesse au petit pois, vous savez celle qui a un bleu le matin parce que sous son matelas, le prince a fait placer un petit pois, histoire de vérifier si son sang est aussi bleu qu’elle le prétend.

Je suis couchée sur le flanc droit, et si un petit pois est sous mon matelas, il est maintenant réduit à du papier à cigarette.
Je joins mes mains, y pose ma joue droite et sur mes doigts glacés, ma joue irradie comme un volcan dans la nuit.

Dehors, l’hiver règne en maître.
Tout ce chaud qui m’assiège, qui s’empare de ma chair, lui donne la mollesse d’un flan aux oeufs.
Commence alors le show de mes insomnies.

Tourne et retourne… je me sens colin dans la poêle à frire.
Moi qui rêve d’être gelée, de sentir le froid m’engourdir et m’apaiser, je sue à grosses gouttes et j’ai comme le corps en gelée. Je suis en voie de liquéfaction.
Voilà que je suffoque, les nerfs à fleur de peau, sentant ce corps qui bouillonne et qui m’abandonne.

D’un bond, je m’extirpe hors du lit.
C’est si bon ! Je suis souillée de transpiration, je préfère errer dans la maison, et aérer mon corps en combustion. Pas besoin du son de cor, pour comprendre l’urgence de la situation.
A l'extérieur de mon corps, il fait seize degrés.
En faisant les cent pas, enfin, je sens le frais.
Ma chair commence à ressembler à celle d’une poule.
Voilà qui n’est pas cher payé pour retrouver un pouls.
Je me réjouis du frisson qui traverse ma masse réanimée.
Considérant après cinq minutes que ce petit jeu a assez duré, je rejoins le grinçant compagnon de mes nuits, rafraîchi lui aussi. Je m’y glisse, couchée sur le flanc gauche.

Ma pensée s’emballe, énumère une foule de choses à faire, à dire, à écrire, à ne pas oublier, à envisager, à rectifier, à planifier… je sais moi !
C’est pas full sentimental, c’est full mental. J’ai la tête qui s’emballe dans un galop chaotique.
En moins de dix minutes, je remonte en pression.
De deux choses, l’une : soit j’explose, soit j’implose.
Dans mes pieds le sang semble en ébullition, mes jambes sont en surchauffe, suivies de mes joues qui s’enflamment, j’éloigne aussitôt la couette de mon corps thermique et je ventile, et je ventile…
Rien n’y fait.

Je me dis que si je lis, c’est fini. Mon esprit sera éveillé pour de bon.
Affalée sur le dos, dans ce lit étouffant, je patiente dans le noir en éloignant mes membres, le plus possible les uns des autres, en éloignant aussi, autant que possible les pensées intempestives qui surgissent.
Au temps de l’enfance, je n’avais pas d’insomnie mais j’étais somnambule...
Cette nuit dans mon esprit, c’est l’embouteillage entre les pensées affluant et les recommandations qui se débattent pour que je retrouve mon calme. Je m’énerve.
Penser à demain, à la fatigue que j’engrange, accrue mon stress. Les bruits m’irritent, les odeurs m’agressent, ma peau me brûle, mes mâchoires mettent mes dents à rude épreuve, mes ongles se plantent dans mes paumes, quant à mon cerveau, il est agité comme un essaim d’abeilles autour d’un pot de miel. Mon corps ne répond plus, il n’est que tension.
J’enrage.

Des dizaines de mots, de lettres se bousculent dans ma tête, formant les phrases qui désignent les maux qui me hantent.
Suffit !! Terminé le jeu du chat et de la souris. Je veux DORMIR !!
Tirer les stores, éteindre les lumières, stopper les turbines, couper le moteur et disparaître le temps d’une nuit.
Comme une évidence, d’ultimes solutions s’imposent.
La douche froide, en fait parti.
Apaisée, ruisselante d’eau fraîche, j’y retourne, bien décidée à gagner la partie.




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