09/01/2012 Logorallye
Aujourd'hui, quelques ingrédients choisis avec soin, pour donner vie au récit...
Texte de Francine
Un soleil pâle et froid déchire
le ciel clair ; l’épiphanie s’étire et les rois mages regagnent leurs
confins lointains.
Noël est passé depuis une bonne
dizaine de jours et la crèche immobile sur un monceau de paille sèche se
statufie pour l’éternité. Marie penchée sur le berceau de l’enfant béni susurre
son jaculatoire émerveillé au bambin mafflu à souhait, qui tend ses petits bras
boudinés à l’attention d’un ange ravi. Joseph, tête baissée, soumis et contrit,
accepte son destin de père procuratoire, tandis que l’âne et le bœuf, épuisés,
la bave spumeuse sortant des naseaux, n’en peuvent plus de réchauffer le
nouveau-né. Les bergers agenouillés s’endorment langoureusement.
Au milieu de cette pastourelle,
veaux, vaches, moutons et volailles mêlés, un polatouche égaré loin de ses grands arbres, joue les écornifleurs
parmi les miettes et rogatons, restes nidoreux des ripailles païennes. Une fois
l’an un regain mystique vient réjouir les frimas, et chacun met son masque
festif pour la grand-messe séculaire.
Cette tradition qui perdure
encore illumine les cristaux neigeux. Un semblant de paix plane sur l’humanité,
comédie carnavalesque de bonheur de surenchère. Un nuage blanc apparait, la
journée s’achemine vers des lendemains incertains.
Texte de Marie-Hélène
Le chien du curé
Par une froide journée d’un hiver brumeux, dans les rues d’un village transi, un facteur du siècle dernier luttait contre le vent, sous sa pèlerine gonflée.
Tel un polatouche égaré, fluet sur sa bicyclette rouillée, soufflant et suant sous le poids d’une sacoche mafflue, il pédalait vers la fin de sa tournée.
Rouge de tant d’efforts déployés, le préposé au courrier s’arrêta prés de la maison du curé.
Devant la porte entrebâillée, un vieux chien aux poils blanchis, sourd et aveugle de surcroît, montait la garde. A ses côtés, éparpillés, gisaient des cierges à moitié dévorés.
Etonné, le messager héla le prêtre. Sur le pas de la porte, l’abbé, engoncé dans une soutane élimée et trop ajustée, lança un jaculatoire vers le ciel pour quémander une faveur : qu’un monceau d’intelligence soit enfin rendu à son fidèle compagnon. Mais celui ci, écornifleur impénitent, prenait ce paquet de chandelles pour un repas digne d’un roi. Son haleine nidoreuse, ses babines spumeuses, le faisaient ressembler à un diable éberlué.
« qu’il est bête ce chien. Il va bientôt se goinfrer des hosties et se désaltérer de l’eau des bénitiers »
Alors, de concert, le facteur et l’aumônier s’en allèrent trinquer à la santé de l’animal, non sans avoir allumé la mèche noircie de la dernière bougie abandonnée. Histoire, peut être, d’aider ce bizarre paroissien à faire pénitence.
Texte de Mistraline
Chaque après-midi, le
long du canal de Beaucaire, les bancs ensoleillés accueillent invariablement
les fessiers séculaires de Lucienne et Josette. Les relents nidoreux de la
cellulose n’incommodent guère leur odorat en berne et pour rien au monde elles ne
se priveraient des va-et-vient qui animent les quais lorsqu’il fait beau.
On remarque de loin le
cheveu roux et spumescent de Lucienne et le profil mafflu de Josette. Leurs
silhouettes sont devenues aussi familières que les pigeons écornifleurs qui
viennent leur tenir compagnie moyennant quelques miettes tirées du fond de
leurs poches.
Elles sont toujours en
conciliabule et leur langue véloce leur a valu le surnom de marathoniennes du
« quand dira –ton ». Lorsqu’elles lèvent le siège chacun imagine les
monceaux de commérages itératifs qui ont pu alimenter leur conversation… Elles
ont beau afficher des mines respectables, leurs messes basses n’ont de
jaculatoire que la ferveur dont elles font preuve pour discriminer le tout
Beaucaire.
Personne n’a oublié l’histoire
de la pauvre Mme Mercier qui avait eu la mauvaise idée d’aller parader avec sa
fourrure flambant neuve le long des quais.
Les deux commères l’avaient vu avancer, le port altier et la jambe légère. Elles durent joindre si fort leurs prières, que la brave Mme Mercier trébucha, vacilla et fit un vol plané si spectaculaire qu'on la crue morte !
Les deux commères l’avaient vu avancer, le port altier et la jambe légère. Elles durent joindre si fort leurs prières, que la brave Mme Mercier trébucha, vacilla et fit un vol plané si spectaculaire qu'on la crue morte !
Mais ce qui a réellement
inscrit l’incident dans les annales de la ville, c’est le surnom que Lucienne
et Josette donnèrent à la malheureuse. Elles la rebaptisèrent « la
polatouche », en référence à ces écureuils volants qui se déplacent en
vols planés…
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